Afin de préserver son pouvoir d’achat, la réaction de se prémunir contre un affaiblissement du CHF face à l’euro apparaît naturelle pour les frontaliers, cette réaction n’est toutefois pas sans conséquences.
En effet, bloquer un taux de change auprès de sa banque n’est pas acte de gestion courante qui est anodin. Il s’agit au contraire de la mise en place d’un contrat qui vous engage fermement pour une durée d’une année au maximum.
Les clauses contenues dans ces types de contrats vous engagent à fournir x milliers de CHF à votre banque sur la période convenue ( 3, 6 9 ou 12 mois )…
En général, ces mêmes clauses ne prévoient aucune possibilité de sortie anticipée du contrat peu importe la cause qui motive votre souhait d’interrompre ce contrat avant son échéant naturelle.
En clair, si :
- vous êtes licencié
- votre revenu baisse
- le CHF ne prend pas la direction envisagée
- … etc…
vous devrez malgré tout aller au terme du contrat et fournir à votre banque la quantité de CHF convenue.
Pourquoi une telle rigidité dans ce type de contrat ?
L’exemple concret détaillé ci-dessous va permettre d’expliquer les causes de cette rigidité ainsi que les mécanismes en jeu.
1 ) vous signez avec votre banque un contrat qui stipule que:
- la banque vous garantit un taux de change à 1 € = 1.15 CHF pour chacun des versements de 4 000 CHF / mois que vous ferez durant une année
- en contre partie vous vous engagez à bien effectuer 12 versements de 4 000 CHF soit au total 48 000 CHF au bout de d’une année
2 ) parallèlement, la banque va souscrire sur le marché à terme un contrat qui va lui permettre d’obtenir tout de suite la somme de 41 739 € en contre partie d’une somme de 48 000 CHF qu’elle s’engage à remettre en une fois au bout d’un an soit un taux de change de 1 € = 1.15 CHF.
3 ) chaque mois lorsque vous verserez vos 4 000 CHF à la banque, cette dernière convertira cette somme en Euros pour un montant fixe de 3478 € qu’elle ira piocher dans la réserve des 41 739 € qu’elle a constitué au départ. Le mécanisme qui permet à la banque de vous offrir une garantie sur le taux de change EUR / CHF réside dans cette intervention de sa part sur le marché à terme et dans le fractionnement qu’elle opère par la suite.
4 ) vous faites 3 versements de 4 000 CHF soit 12 000 CHF puis vous disparaissez. Au bout de l’année, il va manquer à la banque 36 000 CHF pour honorer son obligation de restituer les 48 000 CHF. Il reste également à la banque 31 311 € qu’elle n’a pas pu vous remettre faute d’avoir reçu vos CHF. La banque va devoir changer cette somme libellée en Euros pour tenter de retrouver les 36 000 CHF manquants. Le taux de change en vigueur au moment de cette opération imprévue est inconnu. Si le taux de change est de 1 € = 1.05 CHF en changeant 31 311 € la banque va se retrouver avec 3 276 CHF soit une perte de 3 123 CHF par rapport au 36 000 CHF qu’il lui faut.
La banque cherchera à vous refacturer cette perte car elle n’est pas à l’origine de l’anomalie ( votre arrêt des versements de CHF ) qui l’a causée.
Votre banque connaît ce risque et cette situation n’est souhaitable ni pour vous ni pour elle. C’est pour cette raison qu’elle est aussi stricte dans la rédaction du contrat de couverture de change que vous signez avec elle et qui ne prévoit aucune porte de sortie anticipé car l’aléas sur le change est dans ce cas est bien trop grand. Si l’arrêt unilatéral de vos versements de CHF entraîne un gain pour la banque au moment où elle solde son contrat à terme, elle ne va pas vous restituer ce gain car l’objet du contrat n’est pas la spéculation. Si le contrat se déroule normalement, il ne génère aucune perte ou aucun de gain de change, c’est là le but recherché.
Dans le cadre d’une couverture du risque de change, votre banque joue pleinement son rôle d’intermédiaire financier en mettant à votre disposition des outils de marché qui ne sont pas immédiatement accessibles aux particuliers.